La biologie des derniers oiseaux à dents révélée

Une collaboration internationale dirigée par des chercheurs de l'Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon, montre par imagerie synchrotron que les dents des derniers oiseaux à dents ont des caractéristiques proches de celles des dinosaures théropodes.

Cette étude publiée dans la revue BMC Evolutionary Biology, confirme la parenté étroite entre oiseaux et dinosaures.
 

Les dents sont une véritable bo?te noire qui enregistre au quotidien de nombreux traits de vie de l’animal qui les porte. Ainsi les dents de tous les vertébrés (Homme compris) renferment des informations-clés sur le mode de vie, le régime alimentaire, ou encore les rythmes de croissance. C’est pour cette raison que les dents fossiles sont très prisées des paléontologues et l’étude des dents qui appartenaient à des animaux qui ont disparu sans laisser de descendance permet de lever le voile sur des pans encore méconnus de l’histoire de la vie.
 

Figure 1 : Reconstitution d’Hesperornis, l’un des deux oiseaux à dents étudié ? Courtoisie Imgur
 

 

Les oiseaux actuels sont dépourvus de dents, mais leurs plus proches parents qui se sont éteints il y a environ 66 millions d’années, avaient des dents pointues et acérées qu’ils utilisaient pour saisir leurs proies, principalement des poissons (figure 1). Ces oiseaux, qui se nomment Hesperornis et Ichthyornis, vivaient en Amérique du Nord au Crétacé supérieur aux c?tés des derniers dinosaures. Les restes fossiles de ces oiseaux à dents sont extrêmement rares. C'est donc une opportunité exceptionnelle qui s’est présentée à Ma?tena Dumont, de pouvoir étudier, au sein d'une collaboration internationale pilotée par Antoine Louchart et Laurent Viriot à l'Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon, des dents isolées en utilisant une technique d’imagerie 3D de qualité exceptionnelle produite par l’ESRF (European Synchroton Radiation Facility) de Grenoble. La microtomographie à rayons-X Synchrotron permet de générer des volumes virtuels dont la forme et la structure interne sont fidèles dans les moindres détails à celles des dents fossiles. On peut ainsi se déplacer au sein de la dent virtuelle avec une résolution inférieure au micron (figure 2), et ceci sans abimer le fossile d’origine.
 

Figure 2. Une coupe réalisée de fa?on non-intrusive par technologie synchrotron dans une dent d’Hesperornis, montrant des lignes de croissance journalières (flèches blanches). Trait d’échelle : 0,2 millimètres.


Les résultats obtenus montrent que le remplacement de ces dents au cours de la vie et leur mode d’attachement et d’implantation dans les m?choires sont semblables à ce qu’on conna?t chez les dinosaures théropodes, parmi lesquels se situent les ancêtres des oiseaux. La croissance des dents de ces oiseaux était rapide, plus rapide que chez certains reptiles ou certains mammifères actuels, ce qui peut être mis en relation avec des contraintes liées aux modes de prédation et d’alimentation. Enfin, les dents des deux oiseaux étudiés montrent une couche d’émail simplifiée et amincie, une tendance évolutive qui a possiblement précédé la perte totale des dents.

Dans une étude précédente, Antoine Louchart et Laurent Viriot avaient souligné que la perte des dents chez les oiseaux actuels était un phénomène irréversible et que la fonction exercée par les dents autrefois est aujourd’hui remplie par leur bec corné et leur gésier musculeux. Seule la paléontologie est capable gr?ce aux fossiles de retracer les relations évolutives entre des animaux aujourd’hui disparus.
Publié le 23 septembre 2016 Mis à jour le 2 octobre 2016