Portrait


Portrait de Christian Bordas, référent à l’intégrité scientifique de l’Université Claude Bernard Lyon 1

Christian Bordas a été désigné en qualité de ? référent à l’intégrité scientifique de l’Université Claude Bernard Lyon 1 ?. Il nous présente son parcours et son nouveau r?le au sein de l’Université.

Christian Bordas
Christian Bordas
Quel a été votre parcours professionnel jusqu’à votre nomination en tant que référent à l’intégrité scientifique à l’Université Claude Bernard Lyon 1 ?

Je suis Directeur de Recherche CNRS en physique atomique et moléculaire. J’ai suivi toute ma formation à l’Université Lyon 1 où j’ai soutenu mon doctorat en 1984 et où j’ai été recruté en tant que chercheur CNRS l’année suivante. J’ai depuis fait toute ma carrière au CNRS, combinant implication dans la recherche la plus fondamentale avec des fonctions d’intérêt collectif qui se sont multipliées avec l’expérience acquise. Je suis ainsi investi dans l’évaluation ou l’administration de la recherche depuis près de 30 ans. J’ai en particulier effectué deux mandats au Comité National de la Recherche Scientifique en 1995-1998 puis en 2012-2016, mandat au cours duquel j’ai présidé la section 04. J’ai poursuivi cet investissement dans l’évaluation avec trois années comme Conseiller Scientifique au Hcéres (2016-2019) et enfin un mandat au CNU (2019-2023). En matière d’administration de la recherche, j’ai été directeur du LASIM de 2003 à 2012, période à l’issue de laquelle le LASIM a fusionné avec deux autres UMR pour devenir l’Institut Lumière Matière auquel je suis désormais rattaché.

Je suis actuellement directeur de la Fédération de Recherche André Marie Ampère qui fédère les laboratoires de physique sur le site de Lyon et Saint-Etienne. Je suis également investi dans la politique de site du CNRS en tant qu’adjoint au directeur scientifique référent (ADSR) depuis 2019 pour les sites Alliance Sorbonne Paris Cité et Grenoble Alpes.

En ce qui concerne mes activités de recherche, elles se situent essentiellement dans le domaine de l’étude des états très excités (états de Rydberg) des atomes et des molécules, avec une attention particulière pour les effets du champ électrique et la microscopie de photo?onisation. Afin de réaliser ces études, je me suis consacré de manière intensive au développement des méthodes d’imagerie de photoélectrons et de photoions (VMI : Velocity-Map-Imaging) que j’ai été le premier à introduire en France et qui équipent maintenant la plupart des laboratoires étudiant la dynamique des systèmes atomiques ou moléculaires.
 

Quels sont les grands axes de votre mission en tant que référent à l’intégrité scientifique à l’Université Claude Bernard Lyon 1 ?

Le code de la recherche prévoit la mise en ?uvre de dispositifs garantissant l’intégrité scientifique (IS) dans tous les établissements de recherche publics, via en particulier la désignation d’un référent à l’intégrité scientifique (RIS), enseignant-chercheur ou chercheur désigné par le président de l’établissement. Le RIS est placé sous l’autorité fonctionnelle exclusive du président mais en totale autonomie. Il n’a en revanche aucune responsabilité décisionnelle mais il conseille les instances et peut éventuellement recommander des initiatives.

Dans ce cadre, les grands axes de mes missions s’articulent autour de la veille et de l’information, de l’écoute, et de la gestion des manquements. Dans le détail, je participe à la définition et à la mise en ?uvre de la politique d’intégrité scientifique de l’UCBL à travers des actions de sensibilisation, d’animation, de prévention et de contr?le. Je signale les pratiques ne garantissant pas suffisamment l’IS. J’organise les dispositifs de prévention et de détection des manquements à l’IS. Je recueille les signalements de manquements à l’intégrité scientifique au sein de l’université (fabrication de données, falsification, plagiat…) et les instruis dans le respect du contradictoire. ? l’issue de la procédure, je transmets un rapport à la gouvernance qui décide des suites à donner à chaque signalement. Enfin, je représente l’UCBL auprès de l’Office Fran?ais de l’Intégrité Scientifique (OFIS) et du réseau national des référents (RESINT).

Les missions du RIS s’inscrivent dans un champ d’action plus vaste à travers la participation au comité d’éthique, de déontologie et d’intégrité scientifique (CEDIS) de l’UCBL au sein duquel je contribuerai à la définition et à la mise en ?uvre d’une recherche responsable. Le RIS peut solliciter le CEDIS pour l’instruction de dossiers plus transversaux. Afin de mieux traiter la transversalité et d’être éclairé sur les usages d’autres disciplines scientifiques, je souhaite m’entourer d’un comité opérationnel d’intégrité scientifique.
 

Qu’est-ce qui vous a motivé à accepter ce poste ?

L’intégrité scientifique est le fondement même de toute la démarche d’un chercheur ou d’une chercheuse. Sans intégrité comment les scientifiques pourraient-ils se faire confiance entre eux ? Plus encore, comment la société pourrait-elle leur faire confiance ? Il me semble que si je me suis engagé dans des études scientifiques et dans une carrière de chercheur, c’est précisément parce que je pla?ais au plus haut la notion d’honnêteté et de rigueur de la démarche scientifique qui sont les piliers de l’intégrité. Le fait de me consacrer plus explicitement à l’IS, à la sensibilisation à l’intégrité et de m’investir dans des actions concrètes de veille, d’écoute et de prévention en la matière me semblait être une orientation naturelle de mes activités, alors que l’?ge de la retraite approche et que je n’éprouve clairement pas l’envie de quitter le monde de la recherche. Lorsque la nouvelle équipe présidentielle de Lyon 1 m’a proposé cette fonction, je n’ai donc pas hésité un seul instant pour l’accepter, y voyant une évolution naturelle de mon parcours et une possibilité de rester utile au collectif.
 

Qu’y voyez-vous comme principaux défis et opportunités ?

? l’évidence cet engagement implique de relever des défis, nombreux, et dont certains pourraient devenir existentiels dans le futur :

  • Convaincre du caractère incontournable de l’intégrité scientifique.
  • Mettre en ?uvre des moyens robustes pour détecter la fraude académique.
  • Réparer les dommages liés aux manquements à l’intégrité.
  • Développer une culture de l’intégrité scientifique.
En outre, le défi majeur à l’avenir me semble être lié au développement apparemment sans limite de l’intelligence artificielle. Bien utilisée, l’IA peut être un outil fantastique pour accélérer la recherche, lever des verrous, démultiplier la puissance du scientifique… Détournée, elle peut être le pire ennemi du chercheur en générant ex nihilo des résultats artificiels, en rédigeant de manière automatique des rapports ou des articles ne s’appuyant pas sur la réalité scientifique du laboratoire ou du terrain, en plagiant les travaux d’autrui de manière ? intelligente ? et difficilement détectable, et la liste est longue. Il faut donc éduquer à l’utilisation de l’IA, à ses forces mais aussi à ses limites, et placer toujours au-dessus l’intégrité, c’est-à-dire l’honnêteté, la rigueur et le respect de la communauté scientifique et de la société.

Ces défis s’accompagnent également d’opportunités nombreuses :
  • Le développement de la science ouverte, outil incontournable pour assurer l’IS et le caractère vérifiable des recherches, permet au plus grand nombre d’avoir accès à des résultats fiables et vérifiés au plus proche des avancées récentes de la science.
  • La défense de l’IS est aussi la défense de la science dans son ensemble, contre le développement des pseudosciences, des fake news et plus largement contre l’utilisation délirante de l’information et son détournement par un nombre toujours croissant de communicants et de politiques.
  • Redonner confiance en la science auprès du public et surtout auprès des plus jeunes et les encourager à s’engager dans des filières scientifiques…
Pour conclure, cette confiance de la société envers la recherche académique est selon moi un enjeu majeur pour le futur de nos sociétés et il est urgent de s’y consacrer pleinement.
 

? propos de l’intégrité scientifique : Le code de la recherche dans son article L. 112-1 stipule que les travaux de recherche, et notamment l’ensemble des activités de la recherche publique, doivent respecter les exigences de l’intégrité scientifique visant à garantir leur caractère honnête et scientifiquement rigoureux. L’intégrité scientifique contribue à garantir l’impartialité des recherches et l’objectivité de leurs résultats. Elle constitue le socle d’une relation de confiance entre le monde de la recherche et les autres composantes de la société.


Crédit photographique : Eric Le Roux / Direction de la communication UCBL

Publié le 2 septembre 2025 Mis à jour le 7 novembre 2025